mercredi 9 janvier 2008

Voter sans être citoyen...

Selon le quotidien Le Soleil, le Directeur général des élections du Québec aurait récemment écrit à une vingtaine de municipalités (dont Val-d'Or, Amos, Roberval et Oka) pour les informer qu'elles devaient ajouter à leur liste électorale les noms des membres de Premières Nations vivant dans une communauté voisine.

Cette nouvelle est à la fois surprenante et inquiétante. Elle me rappelle d'ailleurs une récente décision du même DGE qui, lors des dernières élections provinciales, a informé les bureaux de vote qu'une personne pouvait, légalement, voter en ayant le visage voilé. Dans les deux cas, l'initiative du DGE ne fait pas suite à une demande d'un électeur ou d'un groupe. Je sais bien d'ailleurs qu'il n'est aucunement question pour un Mohawk vivant à Kanesatake d'aller voter aux élections municipales d'Oka. Rares sont ceux qui votent aux élections provinciales ou fédérales, alors d'autant moins à des élections municipales d'une ville voisine...

Ce qui est inquiétant, ce sont les réactions que cette nouvelle pourrait susciter. On se rappelle tous des réactions à l'information selon laquelle un électeur pouvait se présenter le visage voilé.

Déjà que les relations entre les Innus de Uashat-Maliotenam et des citoyens de Sept-Îles ne sont pas très bonnes, je crains des réactions négatives inutiles de la part de ces derniers qui verraient d'un mauvais œil la possibilité que des "Indiens-ne-payant-aucune-taxe" puisse avoir une influence sur l'élection des élus municipaux.

D'autres y verront peut-être une tentative de certaines autorités gouvernementales de "municipaliser" davantage les Premières Nations et des les rendre redevables envers des institutions municipales ou régionales. C'est d'ailleurs, je crois, l'une des plus grandes menaces qui guettent présentement les Premières Nations. Pendant qu'elles travaillent à se développer et à renforcer leurs institutions, dans le but de devenir autonomes, le gouvernement du Québec décentralise certains pouvoirs et régionalise certains enjeux. C'est le cas notamment dans la gestion forestière. Le gouvernement a récemment créé des organismes régionaux qui deviennent d'autres intermédiaires entre le gouvernement et les Premières Nations. Plus celles-ci auront à répondre à des institutions régionales, plus on s'éloignera de la relation de Nation-à-Nation qui devait être au coeur des relations Québec-Premières Nations depuis la signature de la Paix des Braves.

Être ouvert aux Premières Nations, ce n'est pas leur offrir de voter aux élections d'instances non-Autochtones, c'est de les aider à développer leurs propres institutions démocratiques et à devenir autonomes.